Nous l’avons découverte scéniquement parlant au Pic d’Or de Tarbes l’an dernier, trois chansons live (un goût de trop peu), qui auront permis à Leïla Ssina de décrocher le Prix d’interprétation. C’est dire notre impatience de découvrir l’univers de l’artiste en live, à Paris, déjà amorcé par la parution d’un premier EP. Ce soir-là, sur la scène de la péniche La Dame de Canton, son et sens naviguaient avec aisance sur de fortes mélodies, magnifiées par les arrangements de la formation au grand complet, Édouard Coquard en exergue (bassiste, arrangeur – et batteur ce soir-là, excellent batteur s’il en est). Les morceaux, aux inspirations world, deviennent alors plus couillus et funky, même s’ils se tiennent aussi en versions plus épurées – l’apanage des bonnes chansons (au Pic d’Or, nous n’avions eu droit qu’à une basse et une guitare).

Sur scène, la voix mutine de Leïla Ssina surprend par sa puissance. Gorgée de soul, souvent jazzisante, et parfaitement maitrisée, elle prend en live une tout autre dimension, un groove, une évidence. Une voix qui porte des textes assumés sur les travers de notre société, non sans humour (« LGDM », « A payer », « Il faut de tout »). La chanteuse se pose en observatrice. Je ne suis pas dans la revendication pure, je suis plutôt dans l’ironie. J’aime bien me moquer des incohérences de la société. Quitte à avoir la parole, autant raconter des choses intéressantes déclarait-elle en septembre dernier à notre confrère le Mandor. Et même quand elle se fait douceur, Leïla Ssina évite le piège de la mièvre chanson d’amour, lui préférant les thèmes de l’existence humaine (« Une vie ») ou de l’exclusion sociale (« Kiss Mokton »). Elle nous a par ailleurs, en fin de set, gratifiés d’un inédit de bon augure pour la suite. Ce soir-là c’était l’été en hiver, la solaire Leïla Ssina a brillé de mille feux.

Leïla Ssina a été sélectionnée parmi les 10 groupes du Grand Zebrock 2014, invités à se produire devant un jury de professionnels, le 30 avril au Canal 93 de Bobigny, avant la grande finale à La Maroquinerie de Paris le 30 mai prochain, pour 3 d’entre eux. On croise les doigts.

Thierry Cadet

Crédit photo : Caroline Petriz

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