…et ne se ressemblent pas. Certains finalistes de l’an passé, requalifiés cette année, n’ont pas confirmé ; d’autres au contraire ont fructifié leur seconde présence sur le tremplin. Comme chaque année depuis 29 ans Tarbes était en fête, le temps de son Pic d’Or, un festival visant l’émergence de nouveaux talents. Pour la troisième année consécutive, Horscene était partenaire et membre du jury de cette manifestation tarbaise, celle qui l’an dernier avait gratifié d’or les prestations live bien mérités d’Askehoug (par ailleurs lauréat quelques mois auparavant du Prix Georges Moustaki, et du Coup de cœur de l’Académie Charles Cros). Une fois encore, et afin d’honorer la 29ème édition de ce concours (ayant révélé notamment au fil des ans Amélie-les-Crayons, Manu Galure de Ptits T’hommes, Jérémie Bossone, Mary* ou Scotch & Sofa), une trentaine d’artistes sélectionnés sur environ 200 candidatures, se sont produits en live devant un jury composé d’Arnold Turboust (Président pour la quatrième fois), Michael Jones (parrain 2014, voir notre interview), Alain Navarro (festival Pause Guitare), François Alquier (« CD’aujourd’hui », Les chroniques de Mandor), Jean-Pierre Pasqualini (Platine, Melody), Stéphane Rigot (Directeur de la structure « Tarbes en Scènes »), Anne Toujas-Marchand (professeur agrégée d’éducation musicale), Pierre Domengès (DA de La Gespe à Tarbes), Stéphanie Berrebi (FrancoFans), et Thierry Cadet (Horscene, Melody, Prix Georges Moustaki).
Les membres du jury du Pic d’Or 2014
Les auditions en public nous ont permis de découvrir de nombreux d’artistes, déjà pré-sélectionnés sur CD par un comité d’écoute, tous susceptibles d’accéder à la demi-finale, puis à la finale, et prétendre ainsi décrocher le titre de Pic d’Or 2014. Depuis quelques années maintenant, le niveau de ce tremplin référence des Hautes-Pyrénées est tel, ne cessant d’atteindre des pics d’excellences, que l’égrainage des candidats se fait plutôt sans heurt au sein du jury, surtout concernant la matinée poussive à laquelle nous avons eu affaire. Car mis à part Roocky et From & Ziel, force est de constater ce matin-là, que bien peu d’artistes nous ont touchés. Alors, on passera rapidement sur l’écorché Lutopia, l’énergique Dani Bouillard, le sautillant Sollex, ou Nicolas Vitas qui avait pourtant un thème de chanson intéressant, le cabrelesque « Nous pourrons toujours courir », pour cela dit inscrire quelques lignes sur Les Galopins (entre Tryo et Les Négresses Vertes), beau musicalement mais malheureusement sans mélodie, Daniel B (le chanteur du groupe Palinka) avec une chanson qui aurait gagnée en efficacité avec un tempo deux fois plus rapide, ou la jolie voix du leader d’Idhem dont on saluera la démarche de ne rien lâcher (il était déjà présent aux auditions l’an dernier), mais dont le manque d’étoffe et de consistance lui fera défaut.
Addie, elle, a suscité débat au sein du jury. Certains, n’aurait pas été contre le fait de la réentendre sur un second titre, hélas trop peu pour le lui permettre. Marie Stone a malheureusement choisi un titre au thème glauquissime (celui d’une femme violée), traité par ailleurs au premier degré sur une musique aux accords mineurs – et par conséquent angoissante, au détriment de sa singulière voix. On atteint ensuite le summum de la ringardise avec Barbara Beghin (ou le croisement de Melissa Mars et Amélie Nothomb) ; après une interminable introduction sur l’absence de ses musiciens, la brunette se lance sur bande orchestre dans une chorégraphie des plus too-much, se déhanchant comme une huître tarbaise échappée de sa coquille, portée par un texte mal écrit et mal chanté. Enfin, on touche définitivement le fond avec Aline Chevalier, dont on ne voit rien à dire, même de pire.
Ce vendredi 23 mai au soir, parmi ceux pré-sélectionnés dans la journée, mais n’ayant pas décroché leur ticket pour la finale du lendemain, on notera tout de même avec intérêt la présence de Le Coz, un peu (trop ?) Guillaume Grand sur scène, un peu (trop ?) Bénabar ou Ours sur disque, sans véritable univers, le souriant Davy Kilembé, à qui être généreux ne suffira pas, le timbre de voix du leader des Cahiers d’Auré, de jolis mots brodés autour de thèmes un peu fouillis, le solaire Marius, qui n’a malheureusement fait preuve d’aucune évolution notable par rapport à l’an dernier (on entend toujours autant Anis, notamment), ou Quessada, doté d’une présence et de mots simples, et justes. Enfin, le cas Virgule nous aura pas mal chagriné. La jeune femme s’étant sentie amoindrie d’arrangements sur la finale 2013, s’est représentée cette année avec une formation de deux musiciens supplémentaires ; pour autant, morte de trac et surtout sans la magie qui la caractérisait sur l’édition précédente (la faute a un mauvais choix de chansons), l’artiste n’a pas réussi à transformer l’essai, malgré son très bel univers.
Samedi 24 mai. L’intérêt et l’enjeu pour les candidats se sont accrus sur la finale, puisque les chansons présentées étaient cette fois au nombre de deux. L’étau se resserrant, seuls 10 artistes ont eu la possibilité de monter sur scène. Présentée par Éric Bentahar (Pyrénées Infos), cette soirée de grande diversité musicale, débutera par le groupe Orlando dont on soulignera l’originalité du projet (un côté cabaret moderne, des looks atypiques, la présence de deux chanteuses en couple à la scène comme à la ville…). Une belle musicalité, des chansons partagées avec sourire et franche générosité, aux thèmes fatalistes (Comment mourir sur cette Terre ? Encore un luxe supplémentaire), mais profonds, qui feront de cette formation toulousaine/parisienne le Prix Sacem de la musique + le Prix du Public.
Gaëlle Vignaux les succède, la malakoffiote a choisi deux excellentes chansons aux mots qui font mouche, nées de sa plume acerbe et tendre à la fois : « La moche » (à l’effet garanti), puis « J’aime tes ex », qui malheureusement sans les arrangements chiadés du nouvel album (voir notre chronique), s’est révélée poussive en guitare-voix ; même si l’espièglerie est toujours là, et la complicité avec un public toujours conquis aussi (Gaëlle loupera de 4 points seulement le Prix du Public, et d’un doigt le Prix du Texte…).
Cyril Adda, ensuite, choisit de défendre en finale sa bien vue « La dem » au très mélodique et efficace refrain. Malheureusement, même s’il a troqué le déguisement d’homme de ménage de son sketch d’intro inutile qui n’apportait rien, à celui d’un banquier de Goldman Sachs, qui n’apporte rien de plus (à part faire un lien avec Michael Jones), l’artiste, sans doute par manque de confiance en lui, fait appel à des références (notamment « Starmania » Nous tout ce qu’on veut c’est être heureux, être heureux avant d’être vieux…) comme si son texte ne suffisait pas à faire passer ses idées, alors que c’est faux. Ses textes se suffisent à eux-mêmes, sans apport de références externes, et surtout sans artifices derrière lesquels Cyril se cache, à tort. Son second titre, au très bons complets mélodiques, fait plouf sur les refrains à cause d’une baisse d’intensité, ce dernier en devient alors trop long et déstructuré. Mais ce touchant garçon est une belle découverte. Doté d’une grande sensibilité, d’un sens aigu des mélodies et d’un vrai timbre de voix, il reste assurément à suivre.
Radio Elvis remporte le Pic d’Or 2014
Radio Elvis. Pour la forme, Pierre Guénard – le chanteur, est moderne, sa posture en scène personnelle (avec un jeté de main notable). Pour le fond, une indéniable recherche dans la réalisation des morceaux, funky et de bons goûts – tournant ce soir-là à deux musiciens seulement, au lieu de trois (soulignons l’indispensable présence du batteur et sampleur Colin Russeil). Enfin, le décalage évident entre le physique de Pierre, et sa voix (au croisement de celles de Dominique A ou Lescop), font de ce projet le plus intéressant de la soirée, notamment en matière de marge de progression. Radio Elvis a gravi l’ascension du Pic, jusqu’à la médaille d’or ; on en reparlera, assurément.
Quentin Bécogné (que nous avions déjà souligné sur Horscene), après l’évocation pleine d’humour de son passé punk et un premier morceau bien moins efficace que son successeur, et qui ne suffira pas à l’emporter et à décrocher une quelconque distinction, reprend son tubesque « Encore un jour sans toi », sauvé de la veille grâce à la valeur ajoutée de la participation du public sur les la, la la, la la, la la la la la la.
K! décroche le Pic d’Argent
K!, quant à elle, décrochera le Pic d’Argent – gageons que le berlingot (l’une des spécialités de la région) offert par l’un des membres du jury ce jour-là, lui aura porté chance. La chanteuse, dotée d’une grande sensibilité et de beaucoup, beaucoup, d’humour, défendra sa première chanson en piano/voix (le Serge présent dans la salle et choisi par l’artiste, s’en souvient encore), plutôt qu’autour de ses pédales et ses samples, comme la veille. Sa seconde chanson, au texte que n’aurait pas renié Guesch Patti tandis que son Etienne se serait glissé entre ses jambes – et faisant référence à la variété, en l’occurrence au « Belles, belles, belles » de Claude François (Les filles tu sais, méfie-toi, c’est pas ce que tu crois), ne fera que confirmer sa médaille d’argent.
Le jovial et bon enfant Roocky, accompagné de son contre-bassiste, confirme malheureusement un univers sans grand relief, aux textes très premiers degrés sans grand intérêt, porté par une interprétation maladroite. « L’amante », « Éléonore » ou « Je suis un homme », ne suffiront pas à séduire le jury, ni le public (tarbais d’origine, le seul de la région ce soir-là, on avait pourtant parié sur un engouement régional en salle qui n’aura finalement pas lieu).
Simon Autain, toujours aussi classe, qui avait raté la marche du podium en finale l’an dernier, à cause notamment d’un mauvais choix de chansons, réussira cette année à décrocher le Prix du texte (des textes pour autant écrits par Benjamin Paulin et Thierry Autain, ce que Simon soulignera à la remise du Prix). Les thèmes sont graves, mais traités avec humour. Si on ne décèle ce dernier qu’à la fin de la première chanson (« Pressé d’être vieux »), lorsque Simon prend les intonations d’une voix chevrotante, on le ressent tout au long de la seconde, « Jamais toujours ».
From & Ziel, impressionnants de décalage entre le pianiste et l’interprète, l’un frêle, l’autre massif, surprennent avec des textes slamés d’une façon assurée et extrêmement convaincante. On ne voit que lui, le sensuel sexuel Samuel Veyrat, qu’on écoute, tout en entendant que l’autre, Ian Zielinski, assurément indissociables. L’intensité de leur exceptionnelle prestation, leur permettra de décrocher le convoité Prix d’Interprétation.
Enfin, ça sent les festivals d’été grâce aux derniers candidats, les membres colorés de BachibouSouk. Une énergie fraiche et communicative s’empare du Théâtre des Nouveautés, le public tape dans ses mains ; les deux titres séduisent petits et grands, sans pour autant faire la différence au sein des jurés.
Enfin, durant la délibération du jury, les spectateurs ont eu le plaisir de ré-entrer dans l’univers cynique du lauréat de l’an dernier, Askehoug. Ré-entendre un ancien lauréat, ce fût aussi le cas la veille au soir lors des délibérations des demi-finales, avec Jesers (Pic d’Argent et Prix du Public 2013), Serge Moniz et Marc Geschickt qui – une fois encore ont su séduire la salle (et les journalistes et programmateurs présents) de leur sincérité, leurs notes et leurs mots à fleur de peau (mention spéciale aussi à la splendide reprise de « Lilly » de Pierre Perret, malheureusement plus que jamais d’actualité). Jesers se produira notamment le 12 juillet prochain, sur le festival Pause Guitare d’Alain Navarro, présent au sein du jury.
La nounou Florence Cortes et la Présidente Corinne Labat
(La parenthèse enchantée) évoquée l’an dernier, a donc réitéré. Les artistes, le jury, le public et les organisateurs (saluons au passage le travail considérable fourni par la Présidente Corinne Labat, les bénévoles Marie, Eric, Corinne D., Laurent, et la nounou Florence Cortes en loges artistes), tous ressortent touchés en plein cœur par cette 29ème édition. Vivement les 30 ans !
La Rédaction
Crédit photos : pixbynot.com
Crédit vidéos : via-production-video.com
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